Le festival du cinéma de La Rochelle a débuté ce vendredi 28 juin. La séance d'ouverture, une fois les remerciements de rigueur formulés, des représentants du collectif, sous les écrans, sont venus prendre la parole et revendiquer ce qui leur revient légitimement. Ces demandes, portant principalement sur la condition précaire des travailleurs des festivals ont trouvé un écho en deux temps chez Alain Guiraudie : politique et esthétique. Le festival débute donc par Miséricorde d’un Alain Guiraudie qui avait surtout marqué par le très bon (grand ?) Inconnu du Lac. Il revient avec une histoire de retour du fils prodigue transformé en amant multiple. Pas besoin de tirer la sonnette d’alarme Juste la Fin du Monde, Guiraudie sait rapprocher sa caméra mais aussi prendre le recul du tableau complet de cette campagne que peu saisissent. C’est aussi embrasser son décor, l’Aveyron, avec sa mise en scène. C’est le cas de nombreuses séquences en forêt, dont la lumière évoque le conte pour enfant, mais renvoie aussi parfois aux tableaux magnifiques de Ceylan. Grande idée que de rendre cet endroit signifiant, tant il est le révélateur de grands fantasmes tout autant qu’une cape qui enveloppe nos actions les plus sordides. Le film de Guiraudie a pour grande force l’ambivalence. Le réalisateur joue les équilibristes entre un film noir de meurtre en campagne, mais aussi (trop poussé sur sa fin), une drôlerie bienvenue. Le comique s’entendait parfois beaucoup plus dans la grande salle euphorique du FEMA, que ce qu’il se passait à l’écran. Mais il existe réellement un emboitement complexe d’un ensemble fataliste magnétique, et de bouffonnerie clémente. Certaines scènes sur la fin du film jouent dans les deux camps. On pense avoir affaire à une tension entre les personnages induite par une situation dramatique de meurtre. On se retrouve entre des amants se refusant en sous-main leur amour envers le bellâtre nouvellement venu.
Mais attention, les apparences sont parfois trompeuses et certains personnages cachent bien plus leur jeu qu’on ne le pense. Ces personnages sont, dans le prolongement du Journal d'un curé de campagne, sans foi. La recherche de la grâce n'est plus affaire de dolorisme. On troque la bourgeoisie, parfaitement capable de renoncer à ses valeurs réactionnaires tant qu'elle peut leur substituer la poursuite de ses intérêts propres, à des (ex)ruraux duplices. On ne sait jamais quoi faire de l'arrivant (Félix Kysyl) ou de Martine (Catherine Frot). Ce syncrétisme trouve son apothéose dans la scène du confessionnal, le de dépositaire de la foi devient incapable d'exercer sa fonction. Le triomphe des affects sur la règle, la grâce ne peut passer que par ce pas de côté.
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